L’histoire de la laiterie de Tocqueville s’inscrit dans un mouvement de profonds changements dans le monde agricole de la fin du 19ème et du début du 20ème siècle. Dès 1905 dans le Cotentin, l’industrialisation, le développement des échanges et la mise en commun de ressources, prennent le pas des premiers mouvements coopératifs danois et new-yorkais des années 1870 : deux coopératives sont crées dans le secteur de La Hague, à Gréville et Benoistville. En 1907, est fondé un syndicat à vocation générale pour porter le projet de création de la laiterie de Tocqueville, le Syndicat du Val de Saire. La laiterie de Tocqueville ouvre le 24 mars 1909, présidée par le baron Alonze d'Espinose.
La présentation que nous vous proposons ci-dessous, est, sur les 50 premières années, un discours écrit en 1959 par le vicomte René Clérel de Tocqueville. Il a présidé la laiterie coopérative de Tocqueville de 1934 à 1960. Il nous raconte à sa façon, l’histoire de la création de La laiterie de Tocqueville et son développement.
Nous sommes le 28 juillet 1959, à la fête organisée pour le cinquantenaire de la fondation de la Laiterie de Tocqueville : dans un vaste hangar prolongé par une tente, plus de 150 invités se pressent autour de tables agréablement décorées. De nombreuses personnalités de la région ont bien voulu honorer cette belle cérémonie de leur présence : sous-préfet, députés, maires, conseillers généraux, le président de la Fédération Nationale des Coopératives Laitières, les présidents des caisses du Crédit Agricole, des représentants des services de l’État, les présidents et directeurs des coopératives de la région et les membres des conseils d’administration, les conseillers communaux et plusieurs experts en divers domaines. Le personnel et les laitiers étaient au grand complet.
Étaient également conviées la Baronne de Resbecq, veuve du Baron Alonze d’Espinose, fondateur et premier président de la laiterie (dont nous reparlerons plus tard) et Madame Auguste Lecorps, veuve de l’ancien directeur, ainsi que leurs enfants.
" Les producteurs de beurre fermier de notre région se trouvaient au début du siècle, dans une situation critique puisque étroitement dépendant d’un petit nombre d’acheteurs parfaitement d’accord entre eux. Ceux-ci étaient les maîtres absolus du marché, en l’absence de toute organisation professionnelle de producteurs, fixaient les prix qu’ils voulaient, s’étant entendus à l’avance sur les cours. Et bien entendu, ces prix étaient des prix minima.
De plus, à la suite de mélange de nos beurres, de très bonne qualité, avec des beurres de médiocre fabrication des régions voisines, on était arrivé à perdre la place de nos beurres fermiers sur le marché de Londres, et tout le monde sait que les bons crémiers de cette capitale affichaient : « Ici, on ne vend pas de beurre normand » !
La situation était donc très grave vers 1900 pour nos cultivateurs. C’est à ce moment que des hommes d’action, énergiques et courageux, résolurent de sortir de l’impasse en organisant la défense professionnelle : ces hommes s’appelaient Damecour, Milcent, d’Espinose, Lemoigne, Rostand, pour ne citer que les plus connus.
Ce furent eux les principaux animateurs du Syndicalisme Agricole et du rassemblement des agriculteurs dans le but d’une défense commune. C’était une entreprise difficile devant l’état d’esprit si profondément individualiste de la masse paysanne, mais qui réussit pleinement en quelques années.
Dans le canton de Saint-Pierre-Église, une petite équipe d’hommes se groupe à l’initiative du baron d’Espinose, en un syndicat professionnel, le Syndicat du Val de Saire. Celui-ci se trouvant trop jeune, demanda que la présidence fût confiée à un homme de valeur éprouvée en qui il avait toute confiance, Monsieur Louis Daboville, ce qui fut admis par l’unanimité des présents.
Dès le début, le syndicat s’occupe d’approvisionnement mais n’oublie pas qu’en plus d’un rôle purement économique, il a un rôle social à jouer. La chambre syndicale, devant le désarroi des producteurs de beurre fermier, étudie le problème sous toutes ses faces et arrive vite à la solution unique : la Coopération.
Il faut donc créer une coopérative, et le 24 mars 1909, l’assemblée générale constitutive se réunit à Saint-Pierre-Église, sous la présidence provisoire de Louis Daboville. A l’unanimité là encore, l’assemblée confie la présidence au Baron d’Espinose, reconnu par tous comme le chef qualifié et incontesté pour prendre en main une organisation si hasardeuse à l’époque.
Il est jeune, puisqu’il n’a pas trente ans, d’une rare intelligence qui n’a d’égale que sa volonté, il est décidé à mettre toute son activité au service de ses amis, les paysans, qui lui ont fait confiance et par delà les paysans, ce qu’il veut servir c’est le pays, c’est la patrie. Il l’a largement prouvé en allant en 1914 jusqu’au sacrifice suprême.
De 1909 à 1914, l’équipe qu’il a rassemblée travaille avec lui en pleine confiance. Lui, le chef, a une foi inébranlable dans l’avenir. « Spes in Deo », c’est la fière devise de sa famille et il la complète par ces quatre mots à chaque occasion importante : « Dieu, Famille, Profession, Patrie ». Dans sa lourde tâche, il a le bonheur d’être secondé par le dévouement constant et éclairé d’une épouse que nous sommes heureux de saluer ici aujourd’hui. Sa foi, il l’inculque à son entourage et malgré les vicissitudes de toutes sortes, malgré les critiques, malgré les abandons, l’équipe tient.
Que de peine pour trouver le terrain d’abord !… Je vois encore les longues discussions auxquelles, enfant de 10 ans, mais déjà passionné de tout ce qui touchait à la terre, je tendais une oreille, parfois indiscrète, à Tocqueville, autour d’un feu pétillant dans la grande cheminée de la maison de famille entre d’Espinose, Gelle, Daboville, Encquebec, Brix, Delisle, Travert.
L’œuvre semblait compromise quand mon père offrit le terrain de la Lande de Vaun, qui semblait quoique excentrique par rapport à Saint-Pierre-Église, représenter beaucoup d’avantages : l’eau de source, la rivière, la solidité du sous sol, l’accès facile, la voie ferrée.
Mais ceci acquis, il fallait trouver un noyau de producteurs, ce qui n’était pas chose aisée en 1909 ! Et voilà notre équipe se répandant sur nos chemins en quête de sociétaires… chacun allant porter la bonne parole à droite et à gauche.
Parfois gentiment éconduits, parfois brutalement repoussés, presque toujours écoutés avec scepticisme, que de fois ils ont entendus des propos de la sorte : « Mais cela ne marchera jamais votre affaire », « personne ne voudra s’engager avant de voir comment cela fonctionnera », « vous n’êtes pas plus intelligents que les acheteurs actuels dont c’est le métier », etc… Mais rien ne devait décourager l’équipe qui continuait sans se lasser sa dévouée propagande.
Pendant cet apostolat, la construction décidée de la petite usine s’élevait petit à petit, grâce à un emprunt garanti par les administrateurs.
Si l’accueil était particulièrement froid aux environs de la laiterie, par contre certains habitants d’autres communes se laissaient convaincre et faisaient entière confiance aux hommes de l’équipe.
Mais après cela, il fallait trouver des hommes pour faire tourner l’usine et des laitiers pour apporter le lait. Là encore que de difficultés ! Ce furent des sociétaires courageux qui n’hésitèrent pas et qui mirent leurs chevaux et leurs voitures à la disposition de la laiterie ! Les Dubois, Hamel, Jourdan, Brix, Jaunet, Bourdet et d’autres… dont certains sont ici aujourd’hui, méritent notre gratitude. Et puis le problème le plus angoissant n’était-il pas de trouver un directeur ? C’est à ce moment-là que le Baron d’Espinose, lié d’amitié avec un homme dont il avait su apprécié l’énergie, l’intelligence et le bon sens, proposa au conseil de nommer directeur Monsieur Alfred Elie, comptable dans une entreprise cherbourgeoise, mais inconnu dans le Val de Saire. Celui-ci, assez inquiet devant la lourde responsabilité qui lui était offerte, ne voulut cependant pas refuser à son ami et il se lança dans l’affaire avec une telle conscience et un tel entrain, qu’en très peu de temps il devint la grande figure de Directeur que nous avons tous connu et estimé pendant plus de trente ans à la tête de notre coopérative. Quel regret qu’il n’ait pu être des nôtres aujourd’hui. Avec quelle joie lui aurions-nous redit notre immense reconnaissance et notre profonde amitié !
C’est avec émotion qu’on relit les premières délibérations du Conseil et c’est avec angoisse que l’on suit les premiers pas de cet enfant si fragile et si nouveau dans son genre.
Mais l’usine est construite, les machines posées, le puits creusé… Tout est prêt pour tourner. Le directeur est à son poste et le conseil est là pour l’arrivage des premiers bidons… Nos laitiers sont fidèles au rendez-vous avec leurs grandes voitures à deux ou trois chevaux. L’écrémeuse tourne bien et la crème est entreposée dans un bac provisoire qui se déversera le lendemain dans la baratte neuve.
Et le lendemain, le beurre est fait. Tout le monde veut le goûter – même les sceptiques – et tout le monde le trouve excellent !
Bonne journée de début. Les jours se suivent et les quelques litres des premiers jours augmentent rapidement, mais une difficulté psychologique surgit : c’est le paiement mensuel. En effet, nos cultivateurs étaient habitués au paiement chaque semaine de leur beurre ; nouvel obstacle, mais il est vite franchi : c’est que lors de la première paie, tout le monde fait son compte et la plus value par la coopérative est sensible… A partir de ce moment-là, la partie est gagnée. Les coopérateurs augmentent chaque mois et la situation est complètement assurée lorsque survient la guerre de 1914.
Le président d’Espinose, sous-lieutenant de réserve au 225ème régiment d’infanterie, demande, malgré ses cinq enfants, à rejoindre immédiatement le front et tombe glorieusement au champ d’Honneur à l’attaque de Suippes le 12 octobre 1914. Le directeur, Monsieur Elie, est mobilisé à son tour. Tout semble conjuré pour démolir l’œuvre si bien commencée.
Mais dans le conseil, l’équipe se reforme autour du vice-président, Louis Daboville. Quand à la direction, elle est assurée par une femme courageuse et qualifiée : c’est la sœur de notre directeur, Madame Elie (maintenant Madame Coupey). Et malgré les difficultés de tous genres, malgré les réquisitions, malgré le départ des hommes, malgré les difficultés de commercialisation, l’équipe d’administrateurs et la directrice font tourner l’affaire au mieux des intérêts de tous.
Et puis, la guerre terminée, Monsieur Elie reprend son poste. La vie reprend son cours normal.
La Coopérative du Val de Saire était arrivée à traiter près de 9 millions de litres, ce qui était beaucoup trop pour ses bâtiments et ses machines, prévues alors pour 2 à 3 millions.
Le président Daboville convoque alors son conseil et la commission de surveillance le 22 avril 1930 pour étudier soit un agrandissement considérable – mais les réserves ne sont pas importantes alors – soit un essaimage sur Quettehou. C’est finalement cette solution qui est adoptée non sans serrement au cœur de voir partir de si bons et fidèles amis.
Une nouvelle coopérative, celle si réputée de Pointe de Saire, un peu filiale de celle de Tocqueville, voit le jour en 1931 sous les auspices de Monsieur Brix. La présidence en est alors confiée à notre collègue et ami Monsieur du Mesnildot.
Au décès de Monsieur Daboville, c’est Monsieur Charles Encquebec qui relève le flambeau et reprend la présidence de la laiterie en 1932, mais son âge et son désir souvent exprimé de laisser la place à des plus jeunes lui font quitter cette présidence pourtant si sage et fructueuse en 1934, date à laquelle le conseil a bien voulu me faire le très grand honneur de me porter à la présidence.
Quelques années se passent sans faits importants, mais Monsieur Elie songe à une retraite bien méritée. Trente années de service sans une faiblesse à un poste aussi absorbant, méritent bien le repos, mais la guerre survient à nouveau et le directeur ne veut pas abandonner le vaisseau dans la tempête avant d’avoir complètement formé son successeur.Son meilleur collaborateur, Monsieur Soul, occupe avec une valeur incontestée le poste de directeur de la laiterie de Quettehou et il ne peut être question de l’enlever à nos amis de Pointe de Saire.
Alors Monsieur Elie se tourne vers un jeune employé en qui il a toute confiance, Auguste Lecorps, et en 1941, en pleine tourmente, nous le nommons directeur. Il n’accepte qu’à la condition que Monsieur Elie veuille bien, avec sa longue expérience, l’aider à remplir sa lourde charge. Quel poids pour un jeune Directeur. Cependant, il sait se faire très vite une place de chef… mais quatre années de guerre le minent rapidement, car il se donne tout entier à sa charge et voilà qu’en 1946, il est atteint du mal implacable qui devait l’emporter si prématurément et si brutalement à l’affection de sa jeune femme et de ses petits enfants si jeunes encore et je peux le dire à l’estime générale des administrateurs, des sociétaires et des employés.
C’est un vide qui semble irréparable pour la laiterie. Pas de Directeur, pas de collaborateur assez avertis pour prendre la place. Je peux dire que le conseil et le président, en plus du profond chagrin ressenti, sont plongés dans l’angoisse.
Mais une fois de plus, celui qui avait été la cheville ouvrière de la laiterie s’offre pour la sauver. Et voilà Monsieur Elie qui reprend du service malgré son âge et son besoin de repos. Il n’accepte que provisoirement jusqu’à ce que nous ayons trouvé un nouveau directeur. Le choix est difficile et le provisoire dure trois ans.
Quand arrive à la laiterie en juillet 1949, muni d’excellentes références, un homme jeune, actif, diplômé d’école de laiterie. Il s’impose vite, ce jeune sous-directeur, par son calme, ses connaissances techniques et son intégrité. Il sera, après à peine trois mois de stages nommé Directeur, celui que nous avons encore aujourd’hui le bonheur d’avoir à la tête de cette maison : j’ai nommé Monsieur Gaston Gourdel.
Celui-ci, aidé d’un personnel dont la fidélité, le dévouement et la valeur professionnelle sont au dessus de tout éloge, porte la renommée de notre coopérative au plus haut point. Nous nous enorgueillissons à juste titre d’avoir un beurre réputé de premier ordre depuis toujours et qui vient d’obtenir le label de qualité de l’AFAQ sous le titre de « Beurre de grand cru du Nord de la Manche » (…)
L’équipe d’administrateurs a été récemment augmentée en passant de 12 à 15. Et si elle comporte des anciens tel notre doyen d’âge Monsieur Laronche (qui est dans sa quatre-vingt-unième année) dont l’expérience et la sagesse nous sont précieuses, nous avons des jeunes dont l’allant et le dynamisme sont les meilleurs garants du développement et du progrès sous toutes ses formes de notre coopérative.
Leur assiduité aux réunions, leur dévouement et leur valeur professionnelle rendent plus aisée la tâche si complexe d’un président surchargé de responsabilités.
Et maintenant, notre laiterie qui est devenue une société respectable puisqu’elle atteint aujourd’hui ses cinquante ans, doit continuer avec le concours d’hommes plus jeunes à suivre sa lancée. Le but des fondateurs est toujours le même : travailler à rendre le maximum de services aux cultivateurs de la région et pour cela transformer avec les moyens les plus modernes le lait des sociétaires en un beurre impeccable et le commercialiser au mieux des intérêts de tous.
C’est une longue prospérité que nous souhaitons à cette belle œuvre coopérative qui a rendu tant de services à la région et qui en rendra encore si nous savons garder les uns et les autres l’esprit véritablement coopératif, c’est-à-dire d’une part, un esprit de progrès constant vers tout ce qui peut améliorer la qualité de nos produits et, partant, la rentabilité de nos exploitations, et d’autre part, un esprit d’amour du prochain et de dévouement totalement désintéressé. "
Ainsi se terminait le discours de René Clérel de Tocqueville.
En 1960, suite à la mise en place de la célèbre Politique Agricole Commune européenne encourageant les investissements, notamment dans des outils de séchage du lait et de son intégration dans la fabrication d’aliments pour les veaux, débute une nouvelle étape dans la gestion du lait en Normandie. Les huit coopératives du Nord Manche fondent UCALMA qui prendra son siège à Sottevast près de Cherbourg, présidée par René de Tocqueville. Cette union devient une coopérative à section en 1967. A compter de cette date, les « petites » laiteries ferment leurs productions pour s’agréer à cette unité de fabrication de Sottevast, disposant de plus de moyens techniques et financiers. En 1971, UCALMA lance un projet de production de pâtes pressées et de lactoserie. Tocqueville et Montebourg y adhèrent, mais les différents sites sont conservés, ce qui provoque des surcoûts de gestion préjudiciables.
La période 1976/1980 fut plus difficile : l’usine de Sottevast produisait du beurre, de la crème, 2.000 tonnes de fromages pour ce qui concernait les produits de bouche et 14.000 tonnes d’aliments pour les veaux, vendus aux groupements producteurs de la région. Lactose codex et dérivés, notamment lactosérum, complétaient la gamme. UCALMA doit faire face à une crise sérieuse liée à une sécheresse très dure en 1976, à l’acquisition d’une fromagerie avec cave d’affinage en Auvergne, difficile à intégrer, et au dépôt de bilan d’un abattoir important, client de la filière « veaux ».
Le redressement de la situation se fait dans l’effort de tous, sociétaires et salariés. Les décisions furent douloureuses : la laiterie de Tocqueville ferma définitivement ses portes en 1985, son personnel, son matériel et sa production transférés à Sottevast, pour donner naissance à l’Union des Maîtres Laitiers du Cotentin en 1986.
Cette nouvelle coopérative, fleuron de l’économie de la Manche et de la Basse Normandie, appartient aujourd’hui à 1.250 producteurs, fait travailler plus de 700 salariés à son siège de Sottevast, et plus de 3.300 personnes à travers une centaine de filiales réparties sur toute la France. Son chiffre d’affaires est d’1,5 milliards d’euros et elle traite 360 millions de litres de lait par an.
Les bâtiments de la laiterie de Tocqueville n’ont pas disparu pour autant. Ils ont bien résisté à l’abandon et furent repris en 1992, pour servir de dépôt et de stockage à un négociant de pièces détachées pour poids lourds. A son tour, l’exploitant regroupa ses activités sur son site de Valognes en 2006 et mis en vente pendant deux ans. Cette période fut difficile pour les bâtiments, qui devinrent un terrain de jeux grandeur nature pour les équipes de paint-ball de la région et quelques « artistes peintres », tagueurs désœuvrés…
En 2009, nous la reprenons pour lui redonner un « petit coup de peinture » à notre tour.
Mais ça, c’est une nouvelle histoire…
Alonze d’Espinoze est né le 8 juin 1880 à Cosqueville dans la Manche. Il est le petit-fils de Louis Edmond d’Espinoze, maire de Cosqueville de 1850 à 1860. Il se marie avec Antoinette Pays le 24 juillet 1906.
Il porte le projet de création de la laiterie à Tocqueville. Visionnaire et entrepreneur, il en sera le premier président à 29 ans, en 1909.
Quand survient la première guerre mondiale, en 1914, il a 34 ans et il est également sous lieutenant de réserve au 225ème régiment d’infanterie. Il n’hésite pas à demander son affectation au front et part dans la Marne. Lors d’une échauffourée très violente à Suippes, il se sacrifiera en un acte héroïque permettant à son unité de se dégager, sauvant ainsi ses hommes. Il décèdera des suites de ses blessures dans l’ambulance qui l’évacue et meurt au champ d’honneur le 15 octobre 1914.
La famille d’Espinose est installée depuis 1804 au château de Bellanville ou « maison de Cosqueville », construit en 1751 sur la commune de Cosqueville et toujours résidence privée de cette même famille.
Le Vicomte René Clérel de Tocqueville est né le 23 avril 1899 à Paris où il fait ses études.
Il est le fils du Comte Christian Clérel de Tocqueville et de la Comtesse née Alix de Chastenet de Puysegur.
Il est aussi le petit neveu d’Alexis de Tocqueville, descendant de Vauban et de Malesherbes.
Passionné d’agriculture, il y consacre toute sa vie. Il aime son terroir normand et y assumera de nombreuses responsabilités.
Il nous raconte l’histoire de la Laiterie de Tocqueville que son père Christian a fondé avec Alonse d’Espinose et qu’il a lui-même présidé.
Il est Maire de Tocqueville de 1922 à 1945 et de Carneville de 1947 à 1977 mais aussi :
Son dévouement pour sa profession est distingué :
Il décède le 13 décembre 1989 au château de Carneville.
À l'ouverture en novembre 1909, la laiterie de Tocqueville comptait 260 coopérateurs "qui groupaient 700 vaches". Le transport se faisait en bidons, par les agriculteurs eux-mêmes ou par les laitiers. Le lait était transformé en beurre et en crème fraîche sous la marque "Val de Saire", réputée sur Paris. Il y eut des tentatives de diversification dans les fromages frais, notamment les petits-suisses "les petits Rex", et même dans les desserts lactés, d 'une manière très artisanale. Les photographies et témoignages qui suivent retracent la vie à la Coopérative du Val de Saire et l'évolution des techniques et des équipements.
Nous avons découvert la Laiterie de Tocqueville en 2008, à l'état de ruine. Les dépendances et l'usine elle-meme était abandonné depuis plusieurs années aux vandales, squatteurs et paint-ballers. La remise en état des différents bâtiments ne nécessitait pas juste un petit coup de peinture mais de gros travaux !
La maison du directeur était une vieille dame délaissée, abîmée par le temps et les déprédations, mais avec un bon fond ! La distribution des pièces n’a pas été modifiée. Par contre, toutes les canalisations, câbles et autres tuyaux ont été changés, et les murs et boiseries refaits à neuf.
Un jardin ? Parlons plutôt d’un terrain très humide, en friche, où les végétaux ont essayé de se faire une place au soleil. Heureusement, on peut jardiner vite avec une pelleteuse. Nous avons tenu à conserver les vieux arbres – osiers, sapins, buis retaillés de frais - et surtout les hortensias devant la villa. Quelques coups de godet et de taille plus loin, on y voit plus clair ! Vient ensuite le temps du dessin des allées et des plantations de nouveaux arbres.
Le garage, dans lequel s’effectuait l’entretien des camions, ne payait pas de mine avec ses tôles rouillées. Nous avons décidé de le transformer en loft, en conservant apparente la structure métallique, ce qui, avec sa grande baie lumineuse et sa hauteur sous plafond, lui donne tout son charme.
Depuis avril 2014, un premier tiers de l'usine est restauré. Nous nous y sommes installés et nous accueillons, dans des jolies chambres d'hôtes, des visiteurs du monde entier. Nous en sommes tout étonnés !
Le caractère industriel de la bâtisse se mêle aux éléments décoratifs du début du 20ème siècle et au confort du début du 21ème siècle. Nous avons encore beaucoup de travail pour aboutir à la rénovation complète du reste des dépendances, qui peut-être un jour accueilleront un nouveau gîte.
A suivre...
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